
Quand on rencontre Alexandra Mathiolon, PDG du groupe SERFIM, ce qui frappe immédiatement, c’est l’alliance entre une histoire familiale centenaire et une vision profondément tournée vers l’avenir. SERFIM a plus de 150 ans, et pourtant, la manière dont elle parle de recyclage, de dépollution et d’économie circulaire donne l’impression d’échanger avec une entreprise née il y a cinq ans, dans un contexte d’urgence climatique et de mutation industrielle.
Elle dirige une filière qui touche à tout ce que les territoires produisent, consomment et transforment : déchets du BTP, matériaux excavés, terres polluées, infrastructures vieillissantes, réseaux qui se modernisent. La conversation explore une conviction forte : le recyclage des matériaux de construction n’est plus un sujet périphérique. C’est désormais un pilier stratégique pour les villes, les chantiers, les entreprises et les acteurs publics.
SERFIM Dépollution et SERFIM Recyclage composent un écosystème opérationnel unique, capable d’intervenir depuis l’identification d’un sol pollué jusqu’à la valorisation des déblais d’un grand chantier. Dans le regard d’Alexandra Mathiolon, on lit autant la responsabilité de perpétuer un métier historique que l’envie d’en réinventer toutes les pratiques.
150 ans de savoir-faire et une transformation guidée par l’urgence environnementale
SERFIM appartient à cette catégorie rare d’entreprises dont la longévité n’a jamais freiné la capacité à évoluer. La direction a changé au fil des générations, les métiers se sont diversifiés, les technologies ont progressé, mais une chose demeure : la volonté d’être utile aux territoires.
Lorsque le groupe se tourne vers la dépollution et le recyclage des matériaux de construction, ce n’est pas un détour stratégique, c’est une continuité. L’entreprise a toujours travaillé dans l’infrastructure, le TP, l’entretien des réseaux. Les déchets et la matière sont donc au cœur de ses activités depuis longtemps.
Ce qui change aujourd’hui, c’est l’échelle. La pression réglementaire, la rareté des ressources, la montée des filières REP, les exigences des donneurs d’ordre et la sensibilité croissante des citoyens transforment ces sujets en priorités nationales. Alexandra Mathiolon le dit avec simplicité : recycler, dépolluer, revaloriser… ce n’est plus du “plus”, c’est du “minimum nécessaire”.
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Dépolluer pour reconstruire : un métier technique, lent et essentiel
Le recyclage des matériaux de construction commence souvent bien avant la benne d’un chantier ou la plateforme de tri. Il commence dans le sol. Dans les anciens sites industriels, les friches, les dépôts d’hydrocarbures, les zones urbaines densifiées.
SERFIM Dépollution intervient dans ces espaces abîmés pour leur offrir une seconde vie. Parfois, on ne voit que la phase spectaculaire – excavation, traitement, sécurisation. Mais derrière chaque chantier, il y a des mois de diagnostics, de mesures, d’analyses. Une expertise très technique, mêlant chimie, géologie, hydrogéologie, réglementation ICPE, compréhension des risques sanitaires.
La dépollution est souvent invisible, mais elle conditionne tout : la possibilité de reconstruire, de réaménager, d'accueillir des logements, des écoles ou des activités industrielles. Elle rend possible la transformation urbaine. C’est une étape fondamentale du cycle de vie des territoires.
Recyclage massif, économie circulaire et nouvelles filières : la révolution des matériaux
À mesure que les villes se densifient et que les grands projets se multiplient, les volumes de terres excavées et de déchets de chantier explosent. Les solutions traditionnelles – mise en décharge, stockage, transport lointain – ne répondent plus ni aux enjeux environnementaux, ni aux capacités disponibles, ni aux exigences économiques.
SERFIM défend une approche circulaire : transformer le “déchet” en ressource.
Cela implique de :
1 créer des plateformes capables de traiter et trier les matériaux à grande échelle
2 développer des technologies de valorisation avancée
3 garantir la qualité des matières recyclées pour qu’elles réintègrent les chantiers
4 réduire les flux logistiques, donc les émissions
5 rapprocher les lieux de production et d’utilisation
Dans les plateformes de recyclage modernes, un matériau excavé peut connaître plusieurs vies. Bétons concassés, graves recyclées, sables recomposés, terres traitées… L’objectif n’est plus seulement d’éviter la mise en décharge, mais de réinjecter ces matières dans la chaîne de construction.
Dans ce modèle, le recyclage devient un moteur de souveraineté matérielle. Une carrière n’est plus la seule source possible : la ville devient une mine à ciel ouvert, dont il faut extraire, trier, traiter et certifier les matériaux.
Le défi des filières et de la réglementation : un secteur en pleine réorganisation
Alexandra Mathiolon insiste sur un point souvent sous-estimé : la complexité des règles et la vitesse à laquelle les réglementations évoluent. La REP PMCB, les normes sur les terres excavées, la traçabilité des déchets, les obligations environnementales… toutes ces dynamiques obligent les entreprises à revoir leurs pratiques.
SERFIM fait partie des acteurs qui structurent ces filières. Le groupe investit dans des outils industriels, construit des partenariats avec les collectivités et accompagne les chantiers vers de nouvelles pratiques.
Pour elle, l’enjeu dépasse largement la conformité. Il s’agit de travailler avec des systèmes vivants : des sols, des eaux, des matériaux qui ont une histoire et un impact réel sur la santé comme sur l’aménagement. Le métier demande de la rigueur, de la science, de la transparence.
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Transmission, culture d’entreprise et leadership responsable
Ce qui rend l’échange particulièrement précieux, c’est la manière dont Alexandra parle de leadership. Elle dirige un groupe ancré dans l’histoire, mais ce qu’elle porte est profondément contemporain : rendre l’entreprise utile, donner du sens au travail, construire un collectif conscient de son impact.
La transmission n’est pas pour elle un concept abstrait. C’est une pratique quotidienne : maintenir un héritage, tout en donnant les moyens d’innover, de tester, de se tromper et de transformer la manière de travailler. Le recyclage des matériaux de construction devient ainsi un terrain d’expression pour une culture d’entreprise vivante, engagée et tournée vers la durabilité.
Un secteur en mutation profonde et une décennie décisive
Le recyclage des matériaux de construction ne se limite plus à une logique de conformité. Il devient un pilier de la résilience territoriale, un levier concret pour réduire les émissions du BTP et une réponse à la pression environnementale.
Avec ses plateformes, ses capacités techniques, sa connaissance fine des sols et sa vision systémique, SERFIM s’impose comme l’un des moteurs opérationnels de cette transformation. Et Alexandra Mathiolon apparaît comme l’une des voix qui rendent cette transition lisible, accessible et ambitieuse.
🎧 Pour aller plus loinÉcoutez l’épisode complet avec Alexandra Mathiolon, PDG du groupe SERFIM Les Bâtisseurs | #23 - Alexandra Mathiolon - PDG de SERFIM : Dépollution, Recyclage, TP... 150 ans de savoir faire au service d'un avenir durable | Ausha